Une Journée folle. ça commence à 11h, CNN “calls” la Pennsylvanie pour Biden, 273 delegates (il en faut 270 pour gagner), game over, Joe Biden est le 46th président des US of A. Mon voisinage trépigne, on tape sur des casseroles, on se croirait aux grandes heures du covid, pour remercier les nurses. On sort dans la rue, et k’ca dance, ça chahute lan’dans, des cornemuses, des tambours, des klaxons, upper west side s’enflamme (c’est pas souvent). Mais avant de parler de ma journée folle, un chapeau bas pour cette démocratie dont on se moque (à juste titre souvent), la plus vieille. Le scénario n’a rien d’étrange, un media, CNN, AP, NYT propose un vainqueur. Trump a été aussi été « élu » avant les comptes finaux (j’imagine qu’en France c’est pareil, à 20h, 100% des comptes ne sont pas dans la boite). La mathématique dit simplement que Trump ne peut plus gagner. Clinton a « conceded » avant les résultats finaux. Tous les perdants, Romney 2012, Mac Caine, 2008, Kerry, 2004, même Al Gore, 2000 ont « graciously conceded ». C’est une (jolie) tradition américaine : on s’est étripés, inondés d’injures, mais il y a, à un moment un respect du « we the people ». Il y aura une exception cette année, parce que « graciously » et « concede » ne colle pas (du tout) avec l’incumbent. A ce propos, certains de mes lecteurs étaient surpris de ce vote qui traine, de ce « bordel ». Un mot : arriver à sortir un élu, accepté par la majorité (même républicaine) d’une élection sous Covid, sous Trump, avec un taux de participation historique (Biden est élu avec le plus grand nombre d’électeurs, ever, le deuxième plus gros score, c’est Trump 2020). Trump a essayé de bloquer la poste, de dénigrer les élections (s’il perdait). Alors moi, je dis : je ne sais pas quelle démocratie aurait été capable, avec ses milliers de petits bras qui ont compté, recompté des millions de ballots, aurait été capable de vaincre l’hydre. Franchement. Chapeau bas. Un autre point pour ceux qui se demandent : le président est officiellement élu quand les 538 delegates se regroupent à Washington, et « votent » donc, ils valident. Le 14 décembre. Biden a 279 (il a chopé au passage le Nevada) et aura sans doute, à cette date, 306 delegates (Georgia et Arizona). Tout ce petit monde votera gentiment, et pis voila. Le reste, ce sera des hurlements sur twitter d’un malade. La machine est en marche. Ma journée folle. Columbus Circle, midi : un incroyable déchaînement de joie et de furie, des vétérans des guerres passées, des jeunes, des vieux, des cris, des chants, une cornemuse, encore (ils sont partout ?). Je ne regarderai plus jamais Columbus Circle de la même façon. Je suis devenu ce jour (un peu plus) un new yorkais, des endroits de cette ville ont maintenant une histoire, mon histoire, cette histoire. Il faisait incroyablement doux, aujourd’hui, les ginkos de Central Park explosaient d’or et de couleurs d’automne, et Biden avait gagné. Un moment très paisible dans cette furie de l’immédiat, un havre, des amoureux, de jeunes parents, un endroit en dehors du temps, une bulle de Ginko biloba d’or et de lumière. En déambulant vers Time Square, notre « OUT NOW » jaune qui pète a fait sensation. On s’est arrêté sur Broadway, à deux pas de Times Square pour un café. Première fois de ma vie que des gens m’ont demandé s’ils pouvaient nous prendre en photos. Pleins. Peut-être sommes nous, comme je parle, célèbres sur instagram. Go figure. Je te laisse, y’a le boss qui cause. Et je t’embrasse, oh, god, yes, je t’embrasse. |
c'est du live, coco.: Quand c’est tout bleu comme ça, Trump est vert, la vie est rose, et orange est “so passé” c'est pas fini, mais on avance: ça bouillote gentiment du cote republicain : les pontes (Romney, Rove, Christie...) commence à prendre le large. La rhetorique trumpienne est toujours basée sur un coup de menton (on l'a dit le petit mussolini orange). Cette mort lente, douce, tellement bidenienne, un etouffement lent, marecageux, une douce asphyxia, that's clever. |
Et le matou revient... il est toujours vivant Jeudi 00h20 heure française Tu reprendras bien une louche d'election americaine ? Pour le tonton d'Amerique ? On avance, on avance. Biden vient de récuperer le Michigan, il lui manque l'Arizona (ce soir a 7pm), et le Névada. En fait le fait de n'avoir que quelques jours de retard pour une élection sous covid et sous Trump avec un taux de participation historique est à mettre au crédit des institutions americaines qui ont tenu le coup. C'est plutôt bien emmanché, comme vient de le dire d'ailleurs Ol' Joe. il peut laisser la Pensylvanie et la Géorgie à Trump, que le petit personnel s'amuse. Malheureusement, il se pourrait que le sénat reste republicain, ce qui ferait de Biden un president "impuissant" (comme Obama pendant 6 ans). Je préfère encore ça à l'autre dingue hurlant tous les jours. Dans ces cas là (sénat contre le president, une sorte de cohabitation) les presidents vont signer des tas de traités, non validés par le congrés, donc caducs, et éliminés à la prochaine election (cf, COP21, Iran...). quand même surpris par le manque de votes pro-Bidden de femmes, de latinos (notamment). Bon, et cette caisse de veuve Cliquot, elle est où ? |
Et le matou revint le jour suivant Même pas mal. comme prevu, les votes in-person plutôt republicains sont arrivés les premiers: c'est tout rouge. Mais depuis le goutte à goutte bleu arrive. D'ici à vendredi. 48h ? Faut que j'm'équipe. ça fait 2 ou 3 bouteilles de gin, un coupe ongle neuf, une bonne louche de benzodiazepines, mais on va y arriver, Biden est le favori "about everywhere". Allez, une pour rire: Dans le wisconsin, un precinct (quartier) n'a pas été encore compte, parce qu'y avait pu d'encre dans la machine.
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Mercredi 4 nov, 12h17, heure française Le bleu fonce c’est sûr, le bleu clair pas-mal-sur, le jaune pile au miyeu, rose et rouge, c’est le nazi. Donc, or, et forcement, si on prend un peu de bleu clair et un peu de jaune et qu’on rajoute au bon bleu fonce (“marine” ahah) c’est dans la poche. * |
Mardi 3 novembre, 19h12, heure française La Nuit du Chasseur Bon, les enfants, ça commence à se gater un peu: Ils barricadent les devantures des magazins à Greenwhich Village, là ou je travaille. Y z'ont même pratiquement fermé mon labo. Ben je vais ou moi ? Au fait, Chérie, on avait pas un vieux Glock 9mm à la cave ? La tension monte à El Paso, et aussi à New York, et aussi un peu partout. Le covid, y doit regarder ça avec des yeux ronds : Ben, les gars, c'est moi qui fait peur, normalement, ho, ho. Je commence mon live très tôt cette année, président anormal = horaires anormaux je résume donc : - dans "normalement Bidden gagne", c'est quoi que tu comprends pas ? - "normalement" j'ai tout dit. Mais le NYT ne te laisse pas tout seul. Il va nous aider avec les aiguilles magiques. les 3 premiers états à sortir des résultats (vers 19-20h, 2am pour toi, tu dormiras) sont la georgia, florida et NC. suivant que les premiers votes seront des mail-in ou des vote-in-person, et avec un algorithme de la mort, le NYT va faire bouger les needles vers le vainqueur. Si Bidden gagne un seul de ces 3 premiers états, c'est dans la poche, si Trump gagne les 3, c'est alors 50/50. comment y savent ? Ben, y savent pas, ça se saurait. mais c'est comme l'acupuncture, je bois moins avec les aiguilles. |
Est-il raisonnable d’écrire une chronique à deux semaines de l’élection présidentielle américaine ? Pas sûr. Comme disait un humoriste en lançant la séquence d’une tirade du monstre orange “listen, it’s kinda funny, especially if you don’t live in the US”. Alors, bon, l’élection. Clairement il y a deux écoles : les optimistes, moi, les pessimistes, eux. Ce qui est drôle, c’est que justement le fait qu’il y ait des pessimistes, me rend optimiste. J’explique, j’étaie, je construits. Il y a quatre ans, les sondages Clinton-Trump étaient très similaires à ceux d’aujourd’hui, il va se prendre une volée mémorable, +10 pour la démocrate dans le Michigan, +12 dans le Wisconsin, on va passer une bonne soirée sur CNN, tu as pensé au guacamole, chéri ? Pour les chips. On s’était habitué, Obama-McCaine en 2008 était aussi plié d’avance, les néo-cons, les je-dérégule-à-tout-va s’étaient pris les pieds dans le tapis de la crise de subprimes, grosse gamelle, on avait même le spectacle gratuit avec Sarah Palin en VEEP mémorable. 2012, avantage au président en place, tout pareil, Romney se prend une tôle, guacamole, un bon Chablis, quand même, chérie, c’est le président. 2016 ? Tout pareil, premier mardi de Novembre, j’ai zigouillé une portion enviable de sarcomes dégueulasses, je rentre de la gare par le chemin des écoliers, plutôt serein, cool. Laisse tomber le guacamole, j’ai fait des croquemonsieurs. Pour Clinton ? Un Sancerre ? C’est cher payé. En anglais on dit « mundane », ben tu chercheras dans le dictionnaire. Je me souviens de cette soirée de novembre 2016, quand la Floride (premier swing state à sortir des résultats) qui était à +12 Clinton dans les sondages est devenue rouge, on a arrêté le guacamole. On a fini le Sancerre. On a coupé le poste. |